Le soir même ou le lendemain – A toi, Ami Meneur, de gérer ce qui a pu se passer dans la journée avec les parents et autres… – tout le monde se retrouve - espérons-le ! - au point de rendez-vous fixé, équipé comme il se doit et surtout comme il le peut…

Le rendez-vous au Col des Vaches

Il suffit d’environ une demi-heure pour atteindre le Col des Vaches en venant de Beau-Bourg et en marchant d’un bon pas : le sentier file droit entre les cultures d’abord puis se met à serpenter en prenant la pente en douceur. Les cultures cèdent la place à des prairies puis, à l’approche du col, quelques landes battues par le vent marin font leur apparition ici et là.

De la bergerie en ruines, on ne voit pas grand’chose, si ce n’est quelques vaches rachitiques, mais du col, pour peu que le soleil se couche (en ce cas juste derrière la Fournaise de la Pieuvre) ou qu’il subsiste quelques lueurs du jour, on découvre tout le panorama des prairies qui vont se noyer dans le Marais de la Sorcière (on l’appelle aussi Le Marais, tout court), où l’île creusée de deux grandes baies se rétrécit jusqu’à presque disparaître sous les eaux avant de ressurgir, telle un monstre des mers, sous la forme de son énorme volcan toujours fumant et rougeoyant.

Si on y arrive de nuit, le panorama ne se voit qu’à la lueur de la lune mais elle ne se lève pas avant minuit environ ; par contre, le rougeoiement inquiétant de la Pieuvre, comme on surnomme le volcan, devient particulièrement impressionnant… ainsi que la petite lueur qui vient peut-être de la cabane de la Sorcière du Marais…

Voilà une ambiance pour Pirates ! En tout cas tels que Poerava les envisage pour le moment… Chacun doit réussir un Jet sous Aplomb, avec toutefois un Bonus de 1 si Poerava ou le Capitaine réussit le sien, de 3 si cette Réussite est critique. Les Echecs à ce Jet ne devraient pas conduire à une fuite éperdue mais simplement appeler à un peu de role-playing de la part des « courageux » pour convaincre les « peureux » de venir quand même. L’Aventure avec un grand « A » nous attend, bande de Flibustiers !

Quelle route pour le volcan ?

Selon Poerava, la meilleure route – sachant qu’au mieux un sentier de berger ou les passages des vaches sont tracés – tirerait plein Ouest en rejoignant la Pointe de la Ligne, la vive crête boisée qui descend doucement du morne du même nom et éviterait ainsi le Marais dans sa partie la plus large, ainsi que la cabane de la Sorcière. La difficulté consiste cependant ensuite à traverser la Furieuse dont les eaux claires et puissantes descendent des hauteurs de la Pieuvre en grondant parfois par-dessus le bruit des vagues, même d’aussi loin que le bord du Marais…

S’il fait encore assez jour, le Capitaine ou l’un des moussaillons en herbe peut tenter de s’orienter par lui-même et chercher s’il ne trouverait pas une route plus habile… Selon les prédispositions de chacun, proposer un Jet sous Intelligence + Navigation / Cartographie ou sous Perception + Chasse.

En cas de Réussite, on ne peut que confirmer le trajet proposé par Poerava. En cas d’Echec, on n’a pas d’autre idée à proposer. En cas d’Echec critique, le Joueur va devoir se fendre d’un peu de jeu de son rôle pour tenter de démontrer aux autres pourquoi il faut absolument passer par le Sud-Ouest et le travers du Marais… (bon courage !) S’il s’agit du Capitaine, cependant, un nouveau Jet sous Aplomb + Commandement peut emporter la décision… ou faire douter de sa capacité à être Capitaine !

Avec une Réussite Critique, on est capable d’expliquer qu’une vallée, difficile à voir d’ici, traverse la prairie et que la traverser semble plus simple en amont, conduisant à faire un crochet avant de rejoindre la route proposée par Poerava.

Cela dit, la pire des routes passe sans doute par le Marais. Et passer le Marais de nuit sans intimement le connaître est une entreprise qui devrait décourager tout le monde dès les premiers pas dans les marécages ou les premiers bains de boue jusqu’à la taille… A moins que les feux follets (De simples phénomènes physiques, dit-on…) ne viennent à bout de nos jeunes héros. Il leur paraîtra sans doute beaucoup plus sage de revenir sur leurs pas… s’ils le peuvent encore !

Tâche donc, Ami Meneur, de les ramener sains et saufs vers l’embouchure de la Furieuse. La traversée, afin de rejoindre la plage sur la berge d’en face, est déjà bien assez difficile comme cela ! Libre à toi cependant de gérer une traverser du Marais, mais par pitié alors, qu’elle soit cauchemardesque et évite dans la mesure du possible une première rencontre trop précoce avec la Sorcière du Marais…

La traversée de la Furieuse

Les eaux de la Furieuse semblent assez calmes vers l’embouchure mais en fait le courant est très fort au milieu. On entend le sac et le ressac de la mer et dans les intervalles le grondement d’une cascade au loin, tout là-haut, dans la forteresse du volcan à la couronne de feu… De loin en loin, un grondement plus sourd et plus profond se fait entendre : c’est une explosion de gaz brûlants, le rejet brutal d’une langue de roche fondue par la gueule invisible de la montagne…

L’eau est froide. La traversée peut se faire en nageant vigoureusement pour ne pas se faire emporter dans la baie, quoique revenir vers la plage ensuite ne soit pas totalement impossible car il n’y a pas de mascaret. Le plus difficile est donc de passer l’équipement et le plus possible de vêtements à sec.

A nos amis Pirates de trouver une solution. Peut-être ont-ils une corde, peut-être vont-ils envoyer un éclaireur pour tenir la corde et passer l’équipement avec une sorte de tyrolienne… Peut-être faudra-t-il leur proposer un Jet sous Intelligence + Bricolages en tous Genres pour débloquer la situation…

En tous les cas, la traversée est réussie à condition que les deux Jets suivants soient réussis : Force + Nourrir les Requins et Constitution + Nourrir les Requins pour le deuxième. De plus, le premier qui traverse doit réussir un Jet en Aplomb + Nourrir les Requins. S’il échoue, en plus des conséquences qu’on va voir, les autres auront un Malus de 1 à leurs deux Jets. Si l’Echec est critique, le Malus sera de 3.

En cas d’Echec à l’un des deux Jets de Nourrir les Requins, appliquer les règles de la Noyade et deux Jets en Constitution + Nourrir les Requins réussis seront nécessaires (ou alors un sauvetage…). Si le premier Jet a été raté, la réussite de deux Jets permet de rejoindre la berge de départ ou bien la même côte un peu plus loin. Si le deuxième Jet a été raté, la réussite de deux Jets permet de rejoindre l’autre berge ou l'autre côte un peu plus loin.

Une fois qu’un Pirate aura traversé et s’il y a une corde, il pourra essayer de hâler les autres à l’aide de la corde, ce qui leur donnera un Bonus de 3 à leurs Jets. En contrepartie, le ou les hâleurs devront réussir un Jet de Force avec un Malus de 3 dû à la force du courant ou sinon re-belotte.

Une fois que tout le monde aura traversé, avec ou sans encombres, la nuit sera en tous cas franchement tombée, si elle ne l’était pas déjà depuis longtemps, en fonction de l’heure qui avait été fixé pour le rendez-vous…

Ascension puis descente sous la lune

Le plus dur du chemin reste à faire ! Peut-être la lune s’est-elle levée, s’il est assez tard. En ce cas le disque large et jaune au début s’élève et blanchit peu à peu dans le dos de nos jeunes amis et éclaire ainsi faiblement mais idéalement leur chemin. Et cela sera vite souhaitable car la route n’est pas claire, faute d’avoir été vraiment tracée…

Une Réussite Critique à un Jet de Perception + Chasse permettra peut-être de trouver la piste peu fréquentée qui remonte le long du cours de la Furieuse et s’élève rapidement dans les contreforts de la Fournaise de la Pieuvre. A défaut d'une telle Réussite, il faudra passer comme on peut à travers la brousse, ce qui nécessitera une machette (ou équivalent), plus de temps et des jets en Intelligence + Navigation réguliers, disons deux jusqu’à la crête.

Le sentier – ou la route frayée à travers les broussailles et les bois – suit quelque temps la rivière en montant fort mais irrégulièrement. Arrivée à un plateau boisé magnifique et très dense. On traverse là le bras principal de la rivière juste au-dessous d’une grande cascade inclinée et juste au-dessus du confluent de la Furieuse avec l’affluent principal venu des hauteurs du Premier Pic du Cerbère.

Suite à ce passage, on sort brusquement du bois et le sentier monte alors très rapidement, en restant à l’orée des bois, puis des brandes, puis de la lande vers la crête qui joint le Premier Cerbère et la Pieuvre, elle, complètement dénudée et très venteuse. On est monté pendant trois à cinq heures et on est à environ mille mètres d’altitude, dans un paysage désolé où les grondements du volcan sont impressionnants, ainsi que les rougeurs du cratère, à moins de mille mètres au-dessus, derrière une crête absolument vertigineuse.

Heureusement, la Crique du Bagnard se trouve en contrebas : on distingue vaguement sa plage et une ombre en son centre sur l’ombre de l’eau : la Suzon ! Mais elle paraît si loin vue de là, cernée de hautes falaises de toutes parts, si bien qu’il semble impossible de descendre par là…

A ceux qui n’auraient que cela à faire – mais on pourrait aussi y reconnaître un vrai passionné – un Jet réussi en Intelligence + Gréements et Manœuvres permettra de reconnaître la silhouette d’une Brigantine, avec ses deux mâts et un beaupré…

Encart descriptif : la Suzon.

Tant qu’on y est, et pour faciliter la lecture, on peut toujours aussi donner les dimensions approximatives de la Suzon, bien qu’il soit évidemment impossible à qui que ce soit parmi nos jeunes amis de les déterminer ainsi de nuit et à une telle distance ! La Suzon semble donc être une Brigantine et, en passant, il n’est pas sûr qu’elle soit « delphine », ni un poisson volant, courtaude qu’elle est du beaupré et ses deux mâts plantés très à l’arrière… Sa coque mesure quinze mètres quatre-vingts de long pour quatre mètres vingt dans la plus grande largeur et trois mètres quarante à la poupe. La hauteur totale de la coque au château arrière est de six mètres soixante-dix jusqu’au bas de la quille, et de quatre mètres soixante au milieu du pont principal. Le tirant d’eau en pleine charge est de trois mètres vingt. Le grand mât mesure vingt mètres contre moins de sept pour le beaupré et quinze pour le mât d’artimon. En ce qui concerne la voilure, nous aurons à y revenir plus tard.

Il va de soi que cette foule de détails n’est pas visible de nuit et de loin comme nous sommes à présent.

De manière plus pragmatique, un Jet en Aplomb + Chasse réussi permet de ne pas perdre courage devant la descente en perspective et de continuer. Une Réussite Critique de l’un des voyageurs permet même de repérer l’étroit passage qui permet au sentier de dévaler la pente entre les falaises jusque vers la plage… L’Echec signifie peut-être que l’équipée va rebrousser chemin si une majorité de ses membres le préfère, les plus courageux finissant par perdre leur courage dans ce cas. L’Echec Critique peut s’avérer très dangereux si une majorité de nos jeunes marcheurs le commet : sans conscience du danger, ils risquent de se lancer dans la mauvaise direction et se retrouver perdus et coincés dans le meilleur des cas…

Bref, toutes ces indications et propositions de Jets de dés sont là pour toi, Ami Meneur de Jeu, afin que tu te fasses une idée de la difficulté à arpenter les lieux. L’important est que tu doses idéalement le suspense, l’ambiance inquiétante du volcan et la progression de tous vers l’objectif : atteindre la Suzon !

Une barque sur la plage…

La chaloupe de la Suzon – en fait l’une des deux chaloupes du Navire – que Pedro Delgado avait utilisée lors de son séjour dans l’Ile du Lézard Jaune est échouée sur la grande mais étroite plage qui s’étend en une tache plus claire entre la noirceur des falaises et celle des eaux de la Crique du Bagnard.

Si nos aventureux marcheurs ont trouvé le meilleur chemin, ils sont sur cette plage et il leur est alors aisé de s’emparer de la chaloupe, non loin de laquelle se trouvent également deux rames encore en bon état. Reste ensuite à mettre l’embarcation à l’eau puis à souquer ferme vers la masse sombre de la Suzon endormie au milieu de la crique.

Pour fendre les eaux sans encombre jusqu’à la Suzon, un Jet en Perception + Pilotage réussi par le Capitaine permettra d’octroyer un Bonus de 1 (3 sur une Réussite Critique) aux Jets des deux « matelots » qui rament. Eux, doivent réussir un Jet en Dextérité + A l’Abordage ! C’est seulement si les deux échouent ou bien si l’un des deux obtient un Echec Critique que la chaloupe chavire (voir alors ci-dessous). Sur un simple échec de l’un des « matelots » seul, la chaloupe ne suit pas la trajectoire la plus courte ni la plus aisée mais finit par atteindre la Suzon.

S’ils sont parvenus à la Crique du Bagnard par un mauvais, voire très mauvais, chemin, il se peut qu’ils aient à nager avant d’atteindre la plage. Il faut aussi et surtout qu’ils repèrent la chaloupe dans la nuit et la distance avant de se décider à nager dans cette direction ! Pour cela, réussir un Jet sous Perception + Vigie est nécessaire. Ensuite, un simple Jet en Agilité + Nourrir les Requins réussi suffit pour atteindre la plage. Le premier à se lancer peut devoir réussir un Jet en Aplomb + Nourrir les Requins, en particulier si la traversée de la Furieuse a été laborieuse.

Dans l’alternative, ils peuvent toujours décider de se lancer directement vers la Suzon à la nage. C’est cependant un choix risqué, surtout de nuit, car la distance à parcourir est assez importante et les eaux de la Crique du Bagnard sont agitées de nombreux petits courants qui gênent la progression. De plus, qui sait ce qui peut se cacher dans les profondeurs de la crique ?…

Le premier à vouloir se lancer dans l’eau doit obtenir une Réussite Critique à un Jet d’Aplomb + Nourrir les Requins pour pouvoir se jeter à l’eau. Si personne n’y parvient, une autre solution devra être trouvée : la traversée à la nage de la crique paraît alors beaucoup trop effrayante et dangereuse… Parvenir à la Suzon à la nage suppose de réussir un Jet en Force + Nourrir les Requins puis au moins deux Jets en Constitution + Nourrir les Requins. Sans compter, Ami Meneur de Jeu si tu es de mauvaise humeur aujourd’hui, la possibilité de se désorienter une fois dans l’eau et de ne pas parvenir du premier coup à atteindre la Suzon… Cela dit, n’en fait pas trop !

Si tout va bien, après quelques péripéties et nous l’espérons donc plus de peur que de mal – Les légendes ne disent-elles pas que dorment dans cette crique des monstres marins affamés ?… – nous voici dans l’ombre de la Suzon, la coque du fier Navire endormi dansant sur l’eau dans un clapotis irrégulier…