Pour le coup, les Guédé forment vraiment une famille… un clan même !

Quant à dire ce qui les distingue des autres Loa ? Ils ne sont sûrement pas élémentaires même s’ils sont parfois très rudimentaires, ils ne sont pas plus utilitaires, bien au contraire !

« Vulgaires ? Ca oui par contre ! Patibulaires ? Ca en a tout l’air ! Expressifs, vindicatifs, agressifs, ridicules à l’occasion et ivres en toute saison ! » dit une comptine Criole que pourtant l’on n’entonne que rarement car, avant tout, les Guédé sont craints et, à ce titre, le plus souvent appelés à l’aide par les Bokor ou des particuliers mal intentionnés (mais audacieux voire téméraires, reconnaissons-le)…

Baron Samedi

Servi suivant le Rituel approprié, Baron Samedi vient chevaucher la Monture désignée. Il ne vient jamais sans une bouteille de rhum brut arrangé au « pimen zwazo » dont il avale régulièrement de bonnes rasades avant de la tendre aux fidèles et comme le dit la comptine déjà citée (il y en a étonnamment un paquet au sujet des Guédé) : « Lorsque Baron Samedi t’offre son rhum-piment, // surtout bois calmement… // ou refuse très très poliment ! » Il se lance ensuite dans une folle série de danses au cours desquelles il va essayer d’inviter toutes les femmes de l’assemblée à danser et généralement plus si affinités (de sa part toujours)…

Or là, attention ! Car il est le Loa des morts et la mort est, sinon souvent du moins régulièrement, l’issue d’un contact « très rapproché » avec lui…

Il peut être appelé de différentes manières, suivant les personnifications qu’il peut adopter, toutes ayant en commun sa peau noire comme l’ébène et ses traits crioles, rappelant les esclaves de Hailthé : Baron Cimetière, tout de noir vêtu, le visage tout enduit de blanc et un dur pieu de bois de fer toujours à la main ; ou bien BaronLacroix, sa personnification la plus « à la mode » si on peut dire : il apparaît alors vêtu d'un costume de soirée blanc, coiffé d'un chapeau haut-de-forme, blanc aussi, et portant des lunettes de soleil (plusieurs paires empilées de préférence) avec des tampons de coton dans les narines, sans doute pour tâcher de limiter les saignements de son nez à chaque – fréquente – pensée lubrique qui lui traverse l’esprit…

Lorsqu’il est « vraiment » le Baron Samedi, il vient avec ses attributs que sont les lunettes fumées et la bouteille de rhum-piment mais son costume et son chapeau sont alors noirs, avec des chaussettes, une écharpe et un bandana (sous le chapeau) violacés… et il est toujours et encore un infatigable danseur de swing et de banda !

Il est le patriarche tyrannique du clan des Guédé. Sa femme est Manman Brigitte.

Baron Samedi est aussi le Loa de la « mort lubrique » et de la résurrection ; on risque de le croiser dans les parages des cimetières où il se met en travers du passage des morts et encore plus des mortes mais nous n’irons pas plus loin sur ce chemin ! En effet, Baron Samedi représente aussi les excès sexuels et sa danse favorite, la langoureuse banda, imite le coït.

Baron Krimi est quant à lui la personification meutrière de Baron Samedi, l’éternel condamné à mort. Il est appelé, non sans effroi, pour prononcer la sentence fatale ou bien la relaxe et il est réputé pour juger vite et sans remord. Baron Krimi est le plus vulgaire et obscène des Guédé, il crache, frappe et insulte à qui mieux mieux tout en buvant de grandes rasades de sa boisson préférée : le kergrozène, un cocktail explosif de grog recoupé au kérozène, avec lequel il lui prend parfois de brûler des poulets vivants… Leurs cris perçants l’apaisent lorsqu’il a le grog triste, dit-on… Sinistre !

Sa couleur ? Le noir évidemment ! Avec parfois pour le relever un peu de violet, voire une pointe de blanc…

Manman Brigitte

Manman Brigitte, épouse de Baron Samedi, est un Loa de la mort. Comme lui, notamment, elle boit des boissons rehaussées de pimen zwazo écrasés. Comme Baron et les Guédé d’une manière générale, elle emploie un langage obscène. Elle protège les pierres tombales et les cimetières, à condition qu'ils soient convenablement pourvus de croix.

Elle est symbolisée par une poule noire.

Guédé Nibo

Beau jeune homme efféminé, Nibo fit longtemps des jaloux dans les deux sexes mais fut un jour assassiné par un inconnu qui attend toujours de payer pour son crime…

A sa mort adopté par Manman Brigitte puis reconnu par Baron Samedi, il devint Guédé Nibo.

Il seconde depuis Baron Samedi dans ses offices macabres, lubriques et spiritueux, en particulier protecteur de ceux qui meurent dans la fleur de l’âge.

Il apparaît le plus souvent dans une tenue d’équitation noire, foulard rose et armé d’une cravache aux lanières de la même couleur qui convient parfaitement à son style de Monture lors des cérémonies en son honneur…

Comme la plupart des Guédé, il fume (le « Pavane ») et il a toujours en main une bouteille mais son rhum est arrangé aux herbes, écorces et orchidées médicinales et il n’en est point trop avare. Son rhum est réputé soigner à peu près toutes les maladies.

Pour l’invoquer, le plus efficace est le sacrifice d’un bouc noir accompagné de plantains grillés, cigares et sésame grillé, le tout arrosé de rhum et de lait fraise (pour la couleur).

Sa couleur, on l’aura compris, est le rose.

Neveux et cousins Guédé

Les Guédé sont une famille presque innombrable aux rôles très entrecroisés, rendant difficile une description exhaustive. Nous nous contenterons ici d’en lister rapidement encore quelques uns dont l’évocation à elle seule donne sans fin des idées d’histoires et de Scenarii…

  • Guédé Ti-Malice, spécialiste des mauvaises farces, voire des coups carrément malhonnêtes mais par ailleurs extrêmement paresseux.
  • Guédé Linto est cité ici car c’est un Guédé hors normes : très poli et gentil, il fait autour de lui continuellement de petits (ou parfois gros) cadeaux et miracles. Il est très petit, peau sombre, très âgé et pour cette raison s’appuie sur une canne et porte des lunettes noires sous un noir chapeau usé. On dit qu’il voit le futur de manière très précise. Le seul problème est qu’il est quasiment impossible de l’invoquer : il vient quand il veut et où il veut, de préférence en aide aux pauvres et aux désespérés.
  • Brave-Guédé, qui n’a rien de si brave et préside à l’instant de la mort : il coupe le fil de la vie. Il a une grosse paire… de ciseaux et un phallus tranché pour attributs, l’association de la lubricité à la mort étant – l’aura-t-on compris ?! – une des marques de fabrique des Guédé.
  • Papa Guédé, la face « gentille » de Baron Samedi et, dit-on, le premier homme qui mourut.
  • Guédé Fouillé, Guédé Loraj, Guédé Plumaj, qu’on appelle aussi Guédé-Hon lorsqu’il se manifeste sous sa forme de canard colérique dont les cris chassent les mauvaises âmes des cimetières, etc. ad nauseam